CTMEN du 15 juin 2018

Déclaration liminaire
de la FSU

Ce comité technique ministériel de l’éducation nationale a à son ordre du jour deux projets de textes relatifs à la désignation des représentants des personnels dans les comités techniques et les commissions administratives paritaires. Ironie des calendriers !

En effet, il n’y a pas trois semaines le gouvernement sonnait une charge contre les commissions administratives paritaires et le paritarisme. Le 25 mai dernier, il présentait en effet aux organisations syndicales représentatives ni plus ni moins qu’un projet de « suppression du paritarisme » afin de faciliter une « déconcentration managériale » de la Fonction publique. Il n’a pas caché son intention de supprimer les compétences des représentants des personnels dans les commissions administratives paritaires en prévoyant notamment de ne plus les consulter sur les projets de mouvement des personnels, l’établissement des listes d’aptitude et des tableaux d’avancement, certaines sanctions disciplinaires…

Ce serait une négation du rôle des élu-e-s et de l’importance de leur travail. Cela aboutirait à ne plus pouvoir faire corriger d’éventuelles erreurs de l’administration, à ne plus pouvoir apporter des améliorations aux projets de l’administration, à priver les personnels du droit à être défendu, à empêcher les élu-e-s d’obtenir des avancées pour l’amélioration de la gestion des carrières et des conditions de travail des personnels. En conséquence, cela donnerait davantage de marge de manœuvre aux chefs de service et d’établissement, avec tous les risques de biais de partialité ou d’arbitraire que ceci implique. Cette volonté gouvernementale de contourner les élu-e-s des personnels est une attaque de plus contre leur statut qui prévoit aujourd’hui que les fonctionnaires participent, par l’intermédiaire de leurs représentants, à leur gestion collective et à l’organisation des services publics.

La FSU est déterminée à ne pas laisser le gouvernement priver les personnels d’un droit : elle a lancé une pétition qu’elle les appelle à signer massivement.

Non content de s’en prendre aux CAP, le gouvernement envisage aussi une possible disparition des comités hygiène, sécurité, conditions de travail après moins de 10 ans d’existence. C’est dire le bien peu de cas qu’il fait de cette avancée majeure pour la Fonction Publique, dans un contexte où les conditions de travail sont pourtant bien dégradées. Est-ce une façon de tenter de cacher les difficultés rencontrées dans les services et les établissements comme pourrait aussi le laisser penser les deux dernières communications faites suite aux avis du CHSCTM sur la réforme du baccalauréat et la circulaire relative à l’amélioration du remplacement ? Pourtant, l’action en CHSCT a montré son importance, par exemple au moment de la réforme de la voie technologique.

Ce comité technique ministériel se tient également à quelques jours du rendez-vous salarial pour la Fonction publique que le gouvernement a été contraint d’avancer par les mobilisations des personnels des 10 octobre, 22 mars et 22 mai derniers. Pour la FSU, ce doit être l’occasion, non de diviser et d’individualiser au prétexte d’instaurer une rémunération prétendument au mérite, mais au contraire de poursuivre le mouvement de revalorisation de carrières et de salaires : plan de revalorisation de la valeur du point d’indice pour rattraper le pouvoir d’achat perdu depuis des années, nouvelles mesures d’intégration de l’indemnitaire dans l’indiciaire, nouvelles attributions de points d’indice de manière uniforme sur l’ensemble de la grille indiciaire. Bref, les revendications ne manquent pas, d’autant que les premières mesures de ce gouvernement en matière salariale (gel de la valeur du point d’indice, décalage d’un an des mesures PPCR, rétablissement du jour de carence, mauvaise compensation de la hausse de la CSG…) ont été à rebours d’une politique de reconnaissance du travail et de l’engagement des agents publics.

Enfin, nous sommes dans l’attente de précisions sur le calendrier et les thématiques de l’agenda social.

Concernant les projets de réforme territoriale des services déconcentrés de notre ministère, la publication du rapport de la mission nationale a suscité une vive inquiétude parmi les personnels des services académiques. Ceux-ci s’expriment réunis en assemblées générales ou par le biais de votations à l’initiative de la FSU ou d’intersyndicales, et partout c’est un refus très majoritaire des projets de fusions d’académies qui sont avancées par ce rapport. Dans l’attente d’un arbitrage ministériel, entouré d’un certain mystère, la FSU réaffirme son attachement au modèle académique d’une part dans son mot d’ordre « NON aux fusions d’académies », et d’autre part en exprimant une grande vigilance quant aux projets de donner aux recteurs de régions académiques une autorité hiérarchique sur les recteurs d’académies, notamment en matière de responsabilité budgétaire. Elle réaffirme que la construction de la carte des académies doit correspondre, comme c’est le cas aujourd’hui, aux besoins d’organisation et de gestion du maillage des établissements et des écoles d’une part, et à la nécessité d’avoir une politique nationale d’éducation qui puisse rester pilotée nationalement, d’autre part.

Dans le premier degré, la première campagne d’accès à la hors-classe selon les nouvelles modalités est source d’insatisfactions. Alors que le guide du rendez-vous de carrière rappelle que « les personnels enseignants, d’éducation ou psychologues de l’éducation nationale doivent pouvoir dérouler une carrière complète sur au moins deux grades », les enseignants du premier degré découvrent un avis figé et qui, le plus souvent, ne reconnait pas leur engagement. Non seulement cet avis est démotivant et pénalisant, mais il est aussi dévalorisant. Autre injustice, en cas d’égalité, c’est l’ancienneté dans le grade qui est prise en compte et non l’ancienneté dans l’ensemble de la carrière, défavorisant ainsi les anciens instituteurs. Pourtant, l’objectif est bien que tous ces personnels accèdent à la hors-classe avant de partir en retraite. Une des réponses réside dans l’augmentation du ratio, toujours non communiqué, permettant l’extension des promotions. Nous demandons que ces engagements permettant des avancées en termes de déroulement de carrière et de rémunérations, soient tenus.

La carte scolaire dans le premier degré n’est pas finie. Malgré les effets de manche, la mesure CP et CE1 à 12 en Education Prioritaire a été insuffisamment budgétée et se réalise au détriment des plus de maîtres que de classes, des nécessaires ouvertures, mais aussi tout particulièrement au détriment de la maternelle et du milieu rural. Abaisser les effectifs est une bonne mesure qui doit se décliner dans toutes les classes, sur l’ensemble du territoire, dans l’éducation prioritaire car la difficulté y est concentrée mais également partout car tous les élèves doivent pouvoir bénéficier de bonnes conditions d’apprentissage.

Le ministre vient d’annoncer le cadre et les grands axes de la réforme de la voie professionnelle scolaire. Les mesures arbitrées, comme celles contenues dans le titre 1 du projet de loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel », révèlent sa volonté de transférer la formation professionnelle des jeunes aux branches professionnelles. Imposer des Unités de Formation d’Apprentissage dans tous les établissements publics mettra en concurrence brutale les filières et fragilisera fortement les statuts des personnels. Devant les chiffres alarmants de ruptures de contrats d’apprentissage subies par les jeunes, la FSU rappelle l’urgence de renforcer la voie professionnelle scolaire afin de sécuriser leurs parcours en pré-bac. Le projet de confier les contenus de formation professionnelle aux branches et, ainsi, d’exclure le service public de cette mission est un recul majeur. Pour la FSU, le cadre quadripartite de la conception des référentiels d’activités professionnelles participe d’un équilibre et de l’intérêt général.

La diminution des horaires élèves prévue est un choix irresponsable au regard des enjeux de société actuels et à venir. Pour la FSU, ce n’est pas « moins d’école » dont les jeunes de lycées professionnels ont besoin mais « mieux d’école ». Le projet de grille horaire « élève » indique une forte réduction d’enseignement pour les disciplines générales. Associé à cette réduction, les dispositifs concernant les « innovations pédagogiques » sont révélateurs d’une vision passéiste des savoirs généraux cantonnés de nouveau à leur seule fonction utilitariste. Or, les disciplines générales ont bien d’autres fonctions : celle notamment de permettre aux jeunes de développer leur libre-arbitre ou celle liée à l’acquisition d’une formation initiale solide – deux éléments indispensables pour appréhender un métier dans sa globalité et activer, plus tard, les dispositifs de formation continue pour évoluer professionnellement. Il ne faut pas beaucoup d’imagination pour voir que cette réforme est pilotée par l’injonction gouvernementale de supprimer 120 000 postes dans la Fonction publique dont 50 000 dans la Fonction publique de l’Etat.

Le ministre a aussi annoncé explicitement « j’ai beaucoup d’estime pour ce que font les professeurs de lycée professionnel ». Mais cette estime reste une fois de plus cantonnée au slogan. Pour la FSU, elle doit se concrétiser par une reconnaissance du travail des personnels et une revalorisation salariale. Il faut remédier à l’injustice profonde vécues par les professeurs de lycée professionnel et accorder la pondération dont bénéficient les personnels des autres voies du lycée. Il est nécessaire aussi d’augmenter l’indemnité spéciale de sujétion liée aux contrôle en cours de formation.

Vouloir revaloriser la voie professionnelle sur la base de restriction budgétaire est irresponsable. Les jeunes comme les personnels de la voie professionnelle ont besoin d’investissements humain et financiers pour améliorer la qualité des formations dispensées dans les établissements, lutter efficacement contre le décrochage et répondre aux nombreux enjeux du point de vue des métiers mais aussi des enjeux de société.

Concernant l’ordre du jour du comité technique ministériel et sans entrer tout de suite dans l’appréciation des textes, nous voudrions pointer notre inquiétude de voir disparaître l’étude des textes relatifs à la création d’un débouché de carrière à la hors-échelle B dans le corps des professeurs de chaire supérieure. Nous œuvrons depuis le début des discussions sur PPCR pour que ce dossier aboutisse, les personnels sont impatients de le voir enfin arriver à terme. Qu’en est-il ?

Par ailleurs, nous voudrions alerter solennellement le ministre sur le retard pris dans l’organisation des élections professionnelles et les dysfonctionnements que nous avons pu constater ces derniers temps. Par exemple, les consultations des comités techniques académiques sur les arrêtés de composition de certaines CAP se sont faites dans la précipitation, les élu-e-s ont eu des difficultés pour obtenir communication de l’équilibre femmes/hommes dans les corps. D’autres arrêtés devront être pris en septembre, gageons que les mêmes atermoiements n’auront pas cours. Par ailleurs, le vote test qui, certes, a pour objectif de vérifier et d’analyser les éventuels dysfonctionnements, n’a pas pu être dépouillé. Beaucoup de problèmes sur cette application ont été décelés. Le temps est maintenant compté pour faire le bilan de ce test et apporter les améliorations nécessaires. Tous ces dysfonctionnements nous font craindre une certaine fragilité du scrutin à venir. Afin que la participation soit à la hauteur de l’enjeu, il est fondamental que notre administration mène une campagne forte sur l’importance du vote.